Napoletani di Partenope


Une publication, avec les textes d'auteurs accompagnant l'exposition, est visible ici: https://fr.calameo.com/read/004929932d1d1534046be




Ma première approche photographique sur l'Histoire et la culture de Naples, à travers les places et les ruelles, commence avec une commande, sur le parcours d'un jeune pêcheur révolutionnaire du 17è siècle, Masaniello, qui entraîne le peuple, enragé par la faim et les taxes qui l'étouffent.
Peu après, j'ai vagabondé, passionnément, dans les fêtes populaires et les traditions, et entamé une collaboration avec une anthropologue française.

"Napoletani di Partenope", est un portrait photographique, réalisé depuis 2004 jusqu'en 2016, en tant que Napolitain qui a vécu à Naples et s'en est éloigné au fil du temps, sans cesser d'y revenir, parce que luntano 'a Napule nun se pò stà (on ne peut pas rester loin de Naples).

A Naples, pays de cœur.
Entre mer et volcans, c'est sur le corps de la sirène Parthénope, figure mythologique de l'Odyssée d’Homère, qu'à surgit Naples, un dédale de quartiers et de venelles obscures, fourmillant d'humanité, fruit de plusieurs siècles de stratifications de civilisations.

C'est une population qui a été abusée, diffamée, notamment par l'unification de l'Italie (seconde moitié de 19è s.). Elle s'est bâtie une carapace, jusqu'à aujourd'hui, contre la diffamation et les stéréotypes de criminalité et de sordidité, qui ne cessent de la pointer du doigt comme une coupable.

Ce pays m'aspire, je me retrouve dans des moments perdus, étourdi, errant dans une musique de transe, happé par des parfums d'antiquité.

Sur cette terre sismique du Vésuve qui peut nous cracher à chaque instant, les Napolitains de Parthénope perçoivent la mort comme une force.
Ils vibrent de tout ce Magma d'Histoires, qui bouillonne de sacralité, en tous ces rituels encore vivants, animés d'une force viscérale, Naples explose dans une dynamique de théâtralité toujours surprenante.

Maurizio Leonardi



Éternel transitoire


À mes yeux, il existe deux manières essentielles pour un photographe d’appréhender le réel qui l’entoure. La première, mélancolique et poétique, est d’isoler un fragment qui se change aussitôt en essence du monde. La seconde, dynamique et narrative, est d’amener le regard à sortir du cadre, à laisser imaginer non seulement ce qui peut entourer la scène, mais aussi son avant, son après. Les images de Maurizio Leonardi appartiennent assurément à la deuxième catégorie.

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C’est l’un des nombreux paradoxes de la ville où il a grandi. À l’écouter, Naples serait une cité plus éternelle que Rome. Me revient ainsi cette remarque que me fit un jour l’acteur Toni Servillo : « Naples est peut-être la seule ville d’Europe, où il y ait encore un peuple. » « Avec Palerme », répondis-je aussitôt, avant de partager son sourire. Mais l’éternité n’est pas immobilisme.

Ici, un balayeur peut bien continuer d’officier en costume et un enfant être brandi comme une petite divinité païenne, la population, elle, n’en finit pas de changer. « Nous sommes tous africains » répétait déjà le chanteur néomélodique Franco Ricciardi en 1997. Vingt ans plus tard, lors d’une paisible après-midi calabraise, l’acteur burkinabé Koudous Seihon m’évoqua Naples avec une immense lueur dans les yeux : « L’Europe commence à Rome, c’est pour ça que je reste dans le sud de l’Italie. »

Lors de mon dernier voyage dans cette ville, je vis une dame chinoise, à l’italien hésitant, se faire rabrouer par un guichetier de la Poste car elle ne comprenait rien aux files d’attente. Finalement résignée, elle se tourna avec moi avant de lancer un « mamma mia ! » sonore, clignant de l’œil et tirant la langue, comme on le fait ici depuis toujours. La ville absorbe, sûre de son identité comme de ses contradictions, toutes celles et ceux qui ont choisi d’y vivre.

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Parmi les sept Madones célébrées à Naples et dans ses environs, il en est une dédiée aux femminielli, les travestis. En Bretagne, ce n’est pas un hasard si Maurizio Leonardi a longtemps travaillé sur les personnes intersexes. En Campanie, la Fête de la Madone de Montervergine, qu’il a beaucoup photographiée, est devenue un rendez-vous international. Naples est une ville naturellement queer.

Aristodemos, tyran de Cumes, qui en chassant l’aristocratie, fut malgré lui à l’origine de la création de Neapolis -la nouvelle ville- était, dit-on efféminée. Si l’on regarde vers la mythologie, la sirène Parthénope, qui donna son autre nom à la ville, Parthénopée, n’avait pas de sexe. Durant l’Antiquité encore, les sculptures d’hermaphrodite étaient très répandues en Campanie. Le musée archéologique n’en conserve pas moins de cinq. Autant dire que les yeux de Pier Paolo Pasolini qui nous observent depuis un mur n’ont rien ici d’un cliché.

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Des animaux hantent les photographies de Maurizio Leonardi, poisson du christianisme primitif, raie changée en masque ou en dessin d’enfant, serpent du jardin d’Eden donnant à la femme dont il enserre le front une inquiétante allure cyclopéenne, oiseaux préhistoriques, poulpe serré dans un poing, tête d’espadon devenu masque lui aussi, écho peut-être à celui de Pulcinella, suprême figure androgyne, dont un film récent de Pietro Marcello, Bella e perduta, a rappelé qu’elle voyageait surtout entre la vie et la mort.

En 1980, le tremblement de terre d’Irpinia a chassé le futur photographe de sa maison de Capodimonte. Son adolescence s’est partagée entre la banlieue de Scampìa -le décor de Gomorra de Matteo Garrone- et le bord de mer où il venait passer ses journées. Sur cette terre sismique, le sursis de l’existence accompagne le quotidien. À Mare Chiaro, où « les poissons font l’amour », comme l’écrit le poète Salvatore di Giacomo, les adolescents gravissent jusqu’au vertige le « Palais des esprits ». Au cimetière des Fontanelle, chacun peut adopter un crâne anonyme et lui demander protection. C’est ce qu’on nomme ici le « rituel des âmes ».

Au Nord de Naples, un homme nu avance parmi les fumerolles de la Solfatara, vers ce que les anciens voyaient comme les portes de l’Enfer. Nous sommes au cœur d’une caldeira immense. Il y a moins d’un demi-siècle, elle s’est soulevée de trois mètres en l’espace de dix ans, avant de retomber et de s’élever à nouveau. Certains y voient le signe avant-coureur possible d’une éruption gigantesque. En attendant la fin du monde, Maurizio Leonardi continue de montrer des scènes qui se jouent de l’Histoire, comme si, dit-il, « on ne pouvait rien y changer ».

Olivier Favier, mars 2018




Il mio primo approccio fotografico sulla storia e la cultura di Napoli, attraverso le piazze e i vicoli, comincia con un lavoro sul percorso di un giovane pescatore rivoluzionario del 17° secolo, Masaniello, che trascina il popolo arrabbiato per la fame e le tasse che lo strozzano.
Poco dopo, vagabondando appassionatamente nelle feste e nelle tradizioni popolari iniziava una collaborazione con una antropologa francese.

"Napoletani di Partenope" è un percorso fotografico, dal 2004, in quanto Napoletano che ha vissuto a Napoli e se ne allontanato negli anni, senza smettere di ritornarci perchè luntano 'a Napule nun se pò stà (non si può rimanere lontano da Napoli).


 A Napoli, paese forte

Tra mare e vulcani è sul corpo della sirena Partenope, figura mitologica dell' Odissea di Omero, che è sorta Napoli, un dedalo di quartieri e di vicoli bui, formicolanti d'umanità, frutto di svariati secoli di stratificazioni di civiltà.

È un popolo che è stato sfrutato, diffamato, notoriamente dall' unità d'italia (seconda metà del 19° secolo. Si è costruito una corazza fino ad oggi contro la diffamazione e gli stereotipi di criminalità e di sordidezzà che non smettono di designarlo come colpevole.
        
Questo paese mi risucchia, nei miei momenti perduti mi ritrovo stordito, errando in una musica  sciamànica, ghermito con dei  profumi d'antichità.

Su questa terra sismica del Vesuvio che può sputarci ad ogni istante, i Napolitani percepiscono la morte come una forza.
Vibrono di tutto questo Magma della storia, strapieno di sacralità, in tutti questi rituali ancora viventi, animati da una forza viscerale, che esplode in una dinamica teatrale sempre sorprendente.

                                                                                                                              Maurizio Leonardi


L’eterno passeggero

Secondo me ci sono due modi con cui un fotografo può capire la realtà che lo circonda. Il primo, malinconico e poetico, è di isolare un frammento che viene trasformato subito in essenza  del mondo. Il secondo, dinamico e narrativo, è di volgere lo sguardo oltre il quadro, lasciando immaginare non soltanto quello che circonda la scena, ma anche ciò che la precede e la segue. Le immagini di Maurizio Leonardi appartengono sicuramente alla seconda categoria.

È uno dei numerosi paradossi della città in cui è cresciuto. A sentirlo, Napoli sarebbe una città più eterna di Roma. Mi viene in mente quest'osservazione che un giorno mi ha fatto l'attore Toni Servillo: «Napoli è forse l'unica città d'Europa dove c'è ancora un popolo» «Con Palermo» ho risposto subito io prima di ricambiare il suo sorriso. Ma l'eternità non è immobilismo.

Qui uno spazzino può benissimo svolgere le sue mansioni in abito elegante, e un bambino può essere esibito come una piccola divinità pagana: il popolo non smette di cambiare. «Noi siamo tutti Africani» lo diceva già il cantante neo melodico Franco Ricciardi nel' 97.  Vent'anni più tardi, dopo un tranquillo pomeriggio in Calabria, l'attore del Burkina Faso Koudous Seihon mi evocò Napoli con un'immensa luce negli occhi: «L'Europa comincia a Roma, per questo rimango nel Sud d'Italia.»

Nel mio ultimo viaggio in questa città, vidi una donna cinese, che parlava un italiano stentato, rimproverata da un impiegato della posta perché non capiva niente nella fila d'attesa. Alla fine, rassegnata, si girò verso di me prima di lanciare un fragoroso «mamma mia!», facendo l'occhiolino e una linguaccia come si fa qui da sempre. La città assorbe, sicura della sua identità come delle sue contraddizioni, tutti quelli e quelle che hanno scelto di viverci.

Tra le sette Madonne venerate a Napoli e nei suoi dintorni, ce n'è una dedicata ai femminielli, i travestiti. In Bretagna non è un caso se Maurizio Leonardi ha lavorato a lungo sull'intersessualità. In Campania la festa della Madonna di Montevergine, che ha molto fotografato, è diventata un appuntamento internazionale. Napoli è una città naturalmente queer.

Aristodemo, tiranno di Cuma, che cacciando l'aristocrazia fu suo malgrado all'origine della creazione di Neapolis - la nuova città- era a quanto pare, effemminato. Se si fa riferimento alla mitologia, la sirena Partenope, che ha dato l'altro nome alla città, Partenope, era asessuata. Durante l'antichità, ancora, le sculture di ermafroditi erano molto diffuse in Campania. Il museo archeologico ne conserva almeno cinque. Sarebbe a dire che gli occhi di Pier Paolo Pasolini che ci osservano da un muro qui non sono un cliché.

Nelle foto di Maurizio Leonardi appaiono animali: un pesce del cristianesimo primitivo, una razza trasformata in maschera o in un disegno di bambino, il serpente del giardino dell'Eden che cinge la fronte della donna, donandole un'inquietante aureola ciclopica, uccelli preistorici, un polpo chiuso dentro un pugno, una testa di pescespada diventata anch'essa maschera, allusione forse a quella di Pulcinella, suprema figura androgina; un film recente di Pietro Marcello, Bella e perduta,  ha ricordato che essa viaggiava di continuo tra la vita et la morte.

Nel 1980, il terremoto dell'Irpinia ha cacciato il futuro fotografo dalla sua casa di Capodimonte. La sua adolescenza si è divisa tra la periferia di Scampia -lo scenario di Gomorra di Matteo Garone- e il litorale, su cui passava le sue giornate. Su questa terra sismica il rinvio dell'esistenza accompagna il quotidiano. A Marechiaro, dove «i pesci fanno l'amore», come scrive il poeta Salvatore di Giacomo, i ragazzi scalano fino ai suoi vertici il «Palazzo degli spiriti». Al cimitero delle Fontanelle, ognuno può adottare un teschio anonimo e chiederne la protezione. È ciò che qui viene chiamato il «rituale delle anime».

A nord di Napoli, un uomo nudo avanza fra le fumarole della Solfatara, verso quella che gli anziani immaginavano essere la porta dell' Inferno. Siamo nel cuore di una caldeira immensa. Meno di un secolo fa si è innalzata di tre metri in dieci anni, prima di sprofondare e di innalzarsi di nuovo. Alcuni ne vedono il segno precursore di una possibile gigantesca eruzione. Aspettando la fine del mondo, Maurizio Leonardi continua a mostrare scene che se ne infischiano della storia, come se, dice lui stesso, «non si potesse cambiare niente».

                                                                                                                        Olivier Favier, marzo 2018